Pr Wajdi Najem (ESIB, 1970): « Un grand de chez nous est parti mais sans nous quitter ».

Ce jeudi 30 mars 2023, l’USJ a perdu un grand homme. Le Pr Wajdi Najem, Ancien vice-recteur à l’administration, Professeur émérite et Doyen honoraire de la Faculté d’ingénierie s’est éteint. Le jour des funérailles, le 1^er avril 2023, le Pr Salim Daccache s.j., recteur de l’USJ prononce une homélie. 

Excellences,

Révérend Père Charbel Chidiac, responsable de la Paroisse,

Révérends Père et Sœurs,

Chers Liliane, Docteurs Samer et Joëlle, chère Maître Yasmina,

Chers Toni, Maître Hoda, et Leila,

Chers membres de la Communauté de l’USJ, révérends pères, vices recteurs, doyens, enseignants, étudiants et anciens étudiants,

Chers Amis,

Nous sommes réunis aujourd’hui pour faire nos adieux à Wajdi Najem que nous avons tant aimé et apprécié en famille, à la Faculté et à l’Université dans les différents postes qu’il a occupés. C’est une page commune d’amitié, de responsabilité et de solidarité que nous avons écrite ensemble et dont nous sommes si fiers qui se tourne mais demeure gravée à jamais dans notre mémoire et de celle de l’Université, surtout à l’approche de la commémoraison des 150 ans de son existence. En disant nos adieux nous le confions à Dieu notre créateur et notre sauveur. Nous savons que les huit béatitudes selon l’Evangile de Saint Mathieu que nous venons de lire et d’écouter dessinent le portrait d’un homme, c’est avant tout celui de Jésus-Christ. Il est même celui qui a vécu de la manière la plus exemplaire chacune de ces béatitudes. 

Retenons que Jésus proclame « heureux » ceux qui accompliront le programme de ces huit béatitudes, tout en étant modeste pour dire ceux qui entrent dans l’esprit de ces béatitudes. Wajdi Najem comme beaucoup de nous qui l’ont connu et côtoyé était un homme heureux, non pour un temps, mais toujours heureux. Quelqu’un l’a-t-il vu sans ce sourire tantôt plein de douceur, tantôt plein d’émotion et qui illuminait son visage ? 

Oui heureux et satisfait d’avoir réalisé ses rêves et sa vie, 

Heureux en fondant une belle famille unie par la force de l’amour et de l’effort, heureux d’avoir vu et accompagné fils et fille dans leur progrès et leur acquisition de leurs diplômes, fiers avec son épouse Liliane de ce qu’ils sont devenus et de leur plein épanouissement dans leurs disciplines,

Heureux en menant de belles années d’école avec des camarades de choix au Collège du Sacré Cœur à Gemmayzé puis travaillant avec discipline digne d’un jésuite pour devenir un ingénieur civil diplômé de l’ESIB en 1970 et un grand spécialiste national et international de l’eau, un directeur chevronné du Centre régional de l’eau et de l’environnement (le CREEN) depuis 1996 et jusqu’à nos jours, un enseignant hors pair reconnu depuis 1976 pour sa science et sa rigoureuse méthode, proche de ses étudiants et de l’équipe des adjoints qui l’aidait dans ses différentes et maintes recherches aquatiques et innombrables publications qui ont marqué et marquent toujours de leur empreinte la marche des savoirs au sein de l’ESIB, de l’USJ et bien au-delà. Dans ce domaine, je ne peux que reporter le témoignage du provincial jésuite de France le père François Boëdec qui a rédigé une thèse mémorable sur le problème de l’eau au Proche Orient et que j’ai rencontré récemment à Paris. M. Najem, m’a-t-il dit, a été un accompagnateur bien précieux dans ma thèse, il s’agit d’un grand connaisseur de la question de l’eau. Wajdi Najem, docteur en génie de l’Université de Montpellier 2 en 1976, avait dirigé une longue liste de thèses qui ont marqué l’histoire de l’Ecole supérieure d’ingénieurs de Beyrouth. 

Heureux d’avoir occupé le poste de Doyen de la Faculté de 2001 du temps du regretté recteur P. Sélim Abou jusqu’en 2010 en des moments difficiles de son histoire, là où il fallait consolider sa situation et réaménager ses programmes et ses labos après des années de souffrance et de destruction. Je me souviens l’avoir appelé en 2003 pour avoir des nouvelles du concours en génie et sa réponse fut bien directe ; cela me fait honneur de venir chez vous pour vous remettre la liste des lauréats de Jamhour et consolider la relation de l’ESIB avec ce bel établissement. Wajdi savait comment nouer des amitiés et comment les maintenir pour le bien commun. Dès ce moment, une amitié continue s’est affermie entre nous et pour longtemps. 

Heureux d’avoir été appelé par le recteur regretté P. René Chamussy s.j. au milieu de son troisième mandat de doyen pour occuper en 2010 et jusqu’en 2019 le poste de vice-recteur aux affaires administratives et financières, poste qu’il a occupé avec bravoure et compétence, grande honnêteté et don de soi au détriment même de sa santé et avec peut-être une réputation d’une gestion bien économique des deniers de l’Université au regard de certains, car pour Wajdi, le plus important était le maintien de la santé de l’institution et de son énergie pour affronter les jours et les crises à venir. 

Par-dessus tout, Wajdi Najem aimait de temps en temps me dire son bonheur d’avoir connu lorsqu’il était étudiant et même après des membres de la communauté jésuite qui existait à Mar Roukoz et qui était formée de quelques pères comme Pierre Hartmann le chimiste, Alban de Jerphanion, le chancelier et le martyr de la guerre libanaise, Henri Ketteler le connaisseur en mécanique des fluides et d’autres aussi. Il faut bien connaître les jésuites en les fréquentant, pour en apprécier les vertus et leur remarquable esprit, me disait-il. Pour lui comme pour beaucoup d’autres, surtout les anciens doyens comme Messieurs Catafago, Asmar et Geara et aujourd’hui Raphaël, l’histoire de l’ESIB sera toujours marquée par cette touche qu’ont apportée les pères jésuites scientifiques qui ont jalonné son histoire.

Mais en tout cela, il ne faut pas se méprendre. Car Wajdi Najem n’a pas oublié le vrai sens de ces béatitudes du Sermon de la Montagne qui sont comme des voies et des chemins à prendre à la suite de Jésus, Son bonheur serait demeuré trop humain et terrestre, s’il ne recherchait pas un sens plus avancé et plus transcendant à sa vie. Il fut heureux car ce qu’il a vécu était porté par un simple désir de service de l’institution, serviteur dans la fidélité parfois aveugle j’en suis témoin, de ses projets et de sa mission, sinon ses missions ; le fait qu’il était heureux n’aurait pas été vrai et profond s’il n’y avait pas cette union fidèle avec la mission. L’USJ, l’ESIB étaient pour lui l’Alma mater, la mère nourricière qu’il fallait protéger en l’aimant simplement de tout son cœur et son esprit. Il a vécu dans un esprit et une pratique de fidélité à ce que représente l’USJ dans toutes ses institutions académiques et de santé comme valeurs et vertus de charité, de solidarité, de confiance et de responsabilité. Wajdi Najem voulait que sa vie soit dédiée à cette mission et il vivait cela dans la modestie, sans claironner et sans pavoiser, lui le couronné d’authentique savoir et de multiples médailles libanaises et françaises de reconnaissance ; la plénitude de sa vie engagée s’est réalisée dans un bonheur qu’il cherchait à communiquer aux autres selon l’esprit des béatitudes. En cela et sans trop chercher à philosopher, son cœur d’une manière spontanée voulait ressembler à son Seigneur Jésus Christ et cette ressemblance à Jésus Christ sera sa récompense qu’il vivra éternellement auprès de ses parents inhumés à Aktanit dans cette belle plaine de la Béqaa.

Cher Wajdi, Que la Sainte Vierge d’Aktanit et du Liban te couvre de ses prières et de son affection pour un repos éternel bien mérité auprès de son Fils, la vie éternelle.

Mes condoléances, à vous toutes et tous venus pour ces adieux. A toute sa famille, à son épouse Liliane, Samer et Joëlle, Yasmina, Son frère Toni, ses sœurs Hoda, et Leila, A toute la communauté des doyens anciens et actuel de l’ESIB, les enseignants, les étudiants et les Anciens ; un grand de chez nous est parti mais sans nous quitter. Qu’il repose dans la Joie de son

Seigneur. Amen