A l'occasion du 75e anniversaire de la fondation de l'Ecole libanaise de formation sociale (ELFS) de l'Université Saint-Joseph de Beyrouth (USJ), des Alumni de l’Ecole, ont partagé leurs expériences et témoigné sur les parcours qu'ils ont empruntés depuis leur passage au sein de cette institution.
Découvrons l’histoire de Marie Hardane, psychologue clinicienne de formation et Alumna de l’École libanaise de formation sociale (ELFS) de l’USJ, qui a obtenu le Diplôme universitaire en prévention de la toxicomanie et réadaptation (2011) et le Master professionnel en travail social - option : counseling socioéducatif (2013). Aujourd’hui, Marie gère son propre cabinet et exerce en tant que que consultante indépendante avec plusieurs organismes.
Mon identité professionnelle a commencé avec ma propre identité. Je n’étais donc pas prédestinée à devenir ce que je suis aujourd’hui. J’étais libre, j’étais perfectible car au départ, aucune voie ne m'était assignée ; J’ai obtenu la licence en psychologie clinique à l’Université Libanaise en 2001, j’ai travaillé en éducation pendant huit ans dans des organisations sociales comme le Centre Saint Charbel-Baabdat, Sesobel et Anta Akhi.
En 2013, j’ai obtenu le Master en Travail Social, avec une spécialisation en conseil socio-éducatif à l’Ecole sociale de l’Université Saint-Joseph, précédé par un diplôme en prévention et réhabilitation des Toxicomanes. J’ai travaillé au Cénacle de la Lumière, Jeunesse Contre la Drogue, l’Ordre Libanais Maronite, Service Jésuites des Réfugiés à Erbil, Réseau Marie Colvin pour les journalistes en zone de guerre au Moyen Orient et au Nord de l’Afrique. En 2018 j’ai continué le Master en Psychologie Clinique, j’ai fait le diplôme en Thérapie Comportementale Cognitive CBT en 2020, l’hypnothérapie avec IMHEB Belgique en 2021. Je suis devenue psychologue Clinicienne, Psychothérapeute en 2022 ce que je suis au fur et à mesure de mon histoire, à l’occasion de mes choix. En plus, actuellement mon travail est libéral, je suis consultante avec Mena Rosa, SIDC, Janiin, Croix Rouge à côté du mon travail dans mon propre cabinet à Jbeil. Mon existence a précédé mon essence alors j’ai créé ce que je suis. Je suis responsable de ce que je suis et de la construction de mon devenir. J’ai vécu plusieurs rôles, sans qu’il y en ait un plus vrai que l’autre, et j’ai pris la distance vis-à-vis d’eux, jouant sur la dose de respect à la règle que je juge nécessaire ou adéquat. Mon devenir se joue donc sur cette scène de théâtre permanent de ma vie.
A cette étape de ma réflexion, je peux dire que le métier de Travailleur Social m’a donné de la valeur. En conséquence, j’ai donné une telle importance au travail dans la définition de mon Moi c’est parce que ce travail m’a procuré une reconnaissance de la société, des autres et de moi-même, et c’est ce degré de sensibilité qui détermine la place que j’ai accordée au travail social dans la définition de mon Moi.
J’ai pu donc, en droit, devenir une infinité de choses, je n’en suis devenue, en fait, qu’une seule. Mon existence, mes rencontres, ses expériences m’ont menée à faire des choix, notamment celui de mon activité professionnelle. Je reconnais ici la difficulté et le caractère crucial des choix qui me sont présentés, notamment dans le domaine professionnel et c’est ce qui explique que mon identité est bien une construction. Mais de quelle identité je parle ?
L’identité personnelle est à la fois identité pour Moi, identité pour autrui. Identité pour moi car elle renvoie dans un premier temps à l’image que je me construis de moi-même. Identité pour autrui car l’identité est aussi l’image que je souhaite renvoyer aux autres. Identité pour l’autre qui se construit à travers l’image que les autres me renvoient.
Et de même l’identité de l’Ecole sociale qui est issue encore d’un processus de construction a marqué ma construction identitaire comme travailleur social en tant que conseillère socio-éducative dans plusieurs organisations Libanaises ou dans le moyen Orient vers la recherche d’une identité plus définie celle de la Psychologue Clinicienne, Psychothérapeute.
Mon identité professionnelle est le sentiment d’appartenance. J’ai choisi donc un métier en fonction de ma personnalité, de mes aspirations, de mes capacités, de mes expériences mais aussi de ma sensibilité au travail social avant et après à la psychologie clinique. Le choix de métier est bien le reflet de mon identité telle qu’elle était au moment de chaque choix : « le métier d’un homme est l’une des composantes les plus importantes de son identité sociale, de son moi et même de son destin dans son unique existence » Hugues E. C., Le regard sociologique, EHESS, 1996, p76.
Je m’identifie à chaque moment à l’activité de travail social. C’est l’utilisation de mes savoirs, de mon style personnel, de mes logiques d’action, de mes stratégies et de mes compétences dans mon activité qui constitue mon identité professionnelle. Ainsi, malgré le fait que la Psychologie Clinique possède actuellement mon identité avec des caractéristiques historiques, je suis unique et je m’approprie les gestes et les logiques de mon métier qui viennent et qui complètent l’intervention sociale avec ses caractéristiques. Je construis donc mon identité professionnelle tout au long de mon apprentissage de ces deux métiers et de leurs perfectionnements. J’ai construit également mon identité professionnelle à travers l’appartenance à ces deux groupes. J’ai intégré presque inconsciemment les gestes, paroles, principes, valeurs ou encore jargons des entreprises où j’ai travaillé. J’ai observé et individualisé mes expériences extérieures dans le travail social. La dimension collective du processus de construction identitaire est ici prouvée. Ainsi, ma construction identitaire est bien, à la fois construite par moi-même, mais aussi par les autres protagonistes de ma vie professionnelle dans le travail social.
Ma construction identitaire est un processus continu, dynamique et interactif. Elle s’exerce tout au long de ma vie professionnelle. Elle évolue dans le temps. Mon identité s’adapte aux contextes et à mes expériences. C’est un ajustement permanent. J’ai plusieurs identités : Je ne peux pas dire que je suis ceci ou cela, je peux seulement constater les caractéristiques de mon identité à l’instant présent. Ainsi mon identité professionnelle est le fruit de l’éducation, d’expériences, de choix, d’habitudes, de rencontres. Elle n’est pas une caractéristique intrinsèque de ma personne, elle se construit et évolue dans le temps, elle est à la fois individuelle et collective mais surtout comme un procédé continu et instable.
Dans mon cabinet, ce qui influence énormément la motivation, c’est tout d’abord le sentiment d’efficacité : le sens du travail se trouve dans la relation que j’établis entre ce que je fais en psychothérapie et ce que cela me permet d’exprimer à propos de moi-même. L’identité professionnelle, sa construction, et la façon dont elle est vécue dans le cadre social participe à cette efficacité, et mieux encore à ce sentiment d’utilité en tant qu’être humain. Elle est une dimension essentielle, c’est un élément de construction de mon être durant mon existence.
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